Toinette (3) - La dernière ... ?
"D'Octobre à Janvier, Dieu fait son inventaire", ce commentaire cynique et sarcastique, censé expliquer l'important nombre de décès durant cette période c'est du ma grand-tante tout craché. Elle ne faisait pas si bien dire.A peine rentrés de trois journées éprouvantes de famangiana, entourage de la famille de Toinette, voilà l'autre nouvelle: X est décédé, puis le lendemain Y.
Moi qui avais déjà préparé mon maillot de bain (noir - ne pas oublier qu'on est en période de deuil) pour ENFIN commencer mes vacances, et PAF ! un hécatombe dans ma famille... Franchement, je sais qu'on ne choisit pas l'heure de sa mort, mais pourquoi avoir choisi le début de mes vacances pour clamser, pourquoi ???
Autant je me sentais proche de Toinette que je considérais comme ma propre grand-mère autant les "nouveaux morts" étaient de parfaits inconnus avant leur célébrité soudaine page 31 de Midi Madagasikara rubrique nécro. S'il faut porter le deuil pour chaque brindille de mon baobab généalogique, où va-t-on ? pas à la plage apparemment... :-(
Bref, j'avais décidé de faire le minimum syndical pour ces deux derniers décès. Le minimum syndical à Mada dans ces situations, c'est la visite de famangiana. Il y a deux parties en jeu:
- la famille du mort (= vangiana)
- la famille qui vient présenter ses condoléances (=mpamangy)
Vu de l'extérieur et sans aucune connaissance de la culture malgache, ce rite est très bizarre. Surtout si comme moi, on ne connaît pas le mort et encore moins sa famille (et/ou les visiteurs selon la place qu'on occupe)
La famille du mort d'abord est assise, souvent mouchoirs à la main, la tête baissée, les yeux dans le vide. Parfois le mort est allongé dans la même pièce à côté d'eux, parfois les visites se font même si le corps n'est pas là.
La famille qui présente ses condoléances se tient généralement debout, en face.
On commence par les salutations de départ auxquelles tout le monde prend part.
Je vous mets le texte au cas où, ça peut toujours servir. (traduction en italique grosso modo)
- Manakory avy ianareo Tompoko (Bonjour M'sieurs Dames)
- Ndreto eto ihany Tompoko (On est toujours là - sous entendu contrairement au mort ?)
- Mamangy amin' ny fahoriana Tompoko.
- Misaotra Tompoko.
Ensuite un représentant de la famille qui visite, prend la parole et commence son kabary (=discours), expliquant le pourquoi de leur présence, assurant la famille de leur réconfort, louant Dieu pour l'exemple chrétien de la personne décédée.
Puis un représentant de la famille du mort répond.
En fait, c'est toujours la même strucutre. Le tout, c'est de le marmonner un peu dans sa barbe, si possible avec une voix caverneuse.
Au bout de 2-3 échanges, on se serre la main à la queu-leu-leu puis on prend congé.
Je me demande bien à quoi rime toute cette mise en scène. Surtout que deux minutes avant cette "cérémonie", les personnes peuvent être d'humeur très badine, plaisantant, mais dès qu'on entend le premier "Miala tsiny", signe annonciateur d'un discours imminent, tout le monde prend sa petite mine contrite et désolée.
Au bout de la troisième fois, on comprend que dans cette pièce de théâtre ne changent que trois choses:
- l'acteur principal et encore, c'est lui qui parle le moins ;-)
- les 2nds rôles (les représentants de la famille qui prennent la parole)
- les figurants (mon rôle fétiche)
Une grande mise en scène.
Les mêmes formules toutes faites.
La même pièce de théâtre.
Mais après tout, la vie n'est-elle pas une grande pièce de théâtre ?
5 Comms:
Punaise, je vais la faire breveter ma dernière phrase ;)
quoi???? tu bloggggg!!!
en plus c'Est TGIF!!! J'adoooooooore
bon je vais o taff je te lis et j'oublie que tu dois être affalée devant ton écran avec un saprice ou un bonbon anglais à touta!!
Bisouxx
Tu oublies un role dans le famangiana, celui de Big Brother, la personnela plus proche du mort observe ceux qui sont venus et honte à ceuxqui sans excuses valables oublient ou tardent d'accomplir leur devoir ! hafa baraka :-)
Mefions nous des jugements hatifs ! les rites dans les sociétés
traditionnelles ne sont pas fortuits, ils jouent un role important comme renforcer les liens
familiaux, communautaires. D'autre part, tu as oublie de mentionner les tsoa-drano.
Dans les rites malgaches, il n'y a pas que des kabary mais il y a des gestes de solidarite effectifs.
Ce qui est important dans une societe ou il n'y a pas de secu et
ou l'etat ne joue pas le role de providence.
Face a la maladie ou la mort d'un proche, l'occidental est souvent
dans le desarroi, il ne sait pas trop quoi faire, le malgache lui sait
qu'est-ce qu'il faut faire pour chaque epreuve !
Meme si le rite est une reponse stereotype, je pense que cela attenue la douleur et le
sentiment de solitude de l'eprouve.
@riri: tu as raison et je ne l'ai pas explicité dans mon post, tous ces rites permettent aux proches de faire le deuil.
Et ca marche bien apparemment. Vive la famille :-p
@Jo: bah là c'est plutot temps cyclonique... Je regarde la pluie tomber en écoutant Fanja Andriamanantena, pas mal le plan :)
Enregistrer un commentaire
Home